Le silence des salariĂ©s 🚹

Illustration titre pour l'article le silence des salariés
Une Ă©tude exploratoire menĂ©e par Milliken, Morrison et Hewlin apporte un Ă©clairage intĂ©ressant sur ce classique de la vie en entreprise : le silence des salariĂ©s. Pourquoi de nombreux employĂ©s hĂ©sitent Ă  exprimer leurs prĂ©occupations ou problĂšmes Ă  leurs supĂ©rieurs ? đŸ˜¶ Les chercheurs sont allĂ©s Ă  leur rencontre pour comprendre les raisons de ce silence des salariĂ©s, Ă  rebours des attentes actuelles sur l’engagement au service de l’entreprise.

Une Ă©tude exploratoire menĂ©e par Milliken, Morrison et Hewlin apporte un Ă©clairage intĂ©ressant sur ce classique de la vie en entreprise : le silence des salariĂ©s. Pourquoi de nombreux employĂ©s hĂ©sitent Ă  exprimer leurs prĂ©occupations ou problĂšmes Ă  leurs supĂ©rieurs ? đŸ˜¶

Les chercheurs sont allĂ©s Ă  leur rencontre pour comprendre les raisons de ce silence des salariĂ©s, Ă  rebours des attentes actuelles sur l’engagement au service de l’entreprise.

Bien que publiĂ©e en 2003, l’étude reste trĂšs intĂ©ressante.

🚹 Quelques rĂ©sultats (Ă©chantillon composĂ© de 40 de personnes)

85% ont dĂ©clarĂ© qu’à au moins une occasion, ils s’étaient sentis incapables de soulever une question ou une prĂ©occupation auprĂšs de leur chef, mĂȘme s’ils pensaient que le problĂšme Ă©tait important.

21% ont indiquĂ© qu’ils se sentaient Ă  l’aise pour parler de problĂšmes ou de prĂ©occupation dans leur organisation actuelle.

🧐 Pourquoi ce silence des salariĂ©s ?

Schéma sur les raisons pour lesquelles les salariés gardent le silence
Extrait de l’article

De fait, les raisons sont multiples, mais la plus courante est la peur d’ĂȘtre perçu nĂ©gativement ou de nuire Ă  des relations professionnelles prĂ©cieuses. Ce silence peut aller de simples inquiĂ©tudes Ă  des questions majeures qui restent non exprimĂ©es.

Les auteurs font une rapide revue de littĂ©rature et identifient les motifs suivants :

  • « L’effet maman » : gĂȘne associĂ©e au fait d’ĂȘtre le porteur de mauvaises nouvelles Ă  leurs supĂ©rieurs (risque de taire ou de minimiser les informations nĂ©gatives)
  • L’effet hiĂ©rarchie : gĂȘne Ă  formuler des critiques concernant les supĂ©rieurs (en relation avec le niveau d’ambition personnelle ou ne niveau de confiance dans ces supĂ©rieurs)
  • L’intolĂ©rance des organisations Ă  la critique et Ă  la dissidence : crainte de « faire des vagues »
  • AccessibilitĂ© perçue des responsables hiĂ©rarchiques
  • La « favorabilitĂ© du contexte » : niveau des consĂ©quences perçues pour soi, son image, sa carriĂšre

Ainsi, le fait de prendre la parole est influencĂ© non seulement par les caractĂ©ristiques de celui qui parle mais aussi du contexte organisationnel et de la relation avec celui qui reçoit le message (manager, supĂ©rieur
).

« Avant de dĂ©cider Ă  s’exprimer sur un sujet particulier, les employĂ©s doivent Ă©laborer une carte cognitive des normes de communication de l’organisation, une carte de ce que l’on peut dire et de ce que l’on ne peut pas dire, et de ce qui peut se produire Ă  la suite de diffĂ©rentes formes de communication. Â»**

Par conséquent, le silence est autant une question individuelle, que sociale, managériale, organisationnelle et culturelle.

Oser s’exprimer est une affaire collective.

📉 Les consĂ©quences du silence des salariĂ©s

Ce manque de communication peut non seulement miner la confiance et le moral des employĂ©s, mais aussi entraĂźner des erreurs coĂ»teuses et des opportunitĂ©s manquĂ©es. Dans certains cas, il a Ă©tĂ© observĂ© que la peur de s’exprimer a contribuĂ© Ă  des dĂ©rives majeures (l’article cite ENRON, mais il y en a plein d’autres, comme Volkswagen et le Dieselgate, Navette Columbia en 2003, #metoo
)

💣 Les thùmes mis sous le tapis

Dans l’ordre, voici les thùmes qui seraient les plus difficiles à aborder :

·         Performances ou compĂ©tences d’un collĂšgue

·         QualitĂ© des processus et performances de l’organisation

·         RĂ©munĂ©ration et Ă©quitĂ© salariale

·         DĂ©saccord sur les politiques et dĂ©cisions de l’entreprise

·         Question d’éthique ou d’équitĂ©

·         HarcĂšlement ou abus

·         Conflit avec les collĂšgues

đŸŽ€ Le dilemme des employĂ©s

« J’avais l’impression que je serais renvoyĂ©e ou que je tomberais en disgrĂące si je parlais. J’avais le sentiment que c’était un impĂ©ratif moral d’agir, mais en fin de compte, je n’ai rien fait. Â» **

Les employés doivent souvent peser les risques de parler contre les conséquences du silence des salariés. Malheureusement, beaucoup choisissent le silence pour éviter des répercussions négatives sur leur carriÚre.

« Si vous remettiez en question certains processus, ils donnaient l’impression que vous vous plaignez et que nous n’étiez pas constructif, de sorte que vous Ă©tiez poussĂ© Ă  faire la grimace et Ă  supporter la situation. C’est l’un des facteurs qui m’a poussĂ© Ă  partir. Â»**

Ainsi, le silence est-il une stratégie individuelle rationnelle à court terme.

Enfin, cette Ă©tude souligne l’importance pour les leaders d’encourager un environnement oĂč la communication ouverte est valorisĂ©e et oĂč les employĂ©s se sentent en sĂ©curitĂ© pour partager leurs prĂ©occupations. đŸŒ±

L’apport de l’Art du choix

L’Art du choix propose des ateliers pour prendre conscience de ce silence, de cette difficultĂ© Ă  oser s’exprimer et de ces consĂ©quences. Les pratiques su consentement ici, alors qu’elles semblent Ă©loignĂ©es, permettent de dĂ©velopper la confiance relationnelle nĂ©cessaire Ă  la prise de risque que constitue la prise de parole. On travaille sur les freins individuels et relationnels.

En outre, l’entreprise doit questionner sa culture, les relations institutionnelles et les relations managĂ©riales pour crĂ©er un contexte favorable et rassurant pour la prise de parole.

🔍 À mĂ©diter : Comment votre organisation gĂšre-t-elle la communication ascendante ? Vos employĂ©s se sentent-ils suffisamment en confiance pour s’exprimer ? La personne qui partage une prĂ©occupation est-elle plus souvent considĂ©rĂ©e comme aidante et courageuse ou comme pĂ©nible et rĂąleuse ?

#Leadership #Management #CultureDentreprise #Communication #sécuritépsychologique #psychologicalsafety

Retrouver l’étude : Milliken, F.J., Morrison, E.W. and Hewlin, P.F. (2003), An Exploratory Study of Employee Silence: Issues that Employees Don’t Communicate Upward and Why. Journal of Management Studies, 40: 1453-1476. https://doi.org/10.1111/1467-6486.00387

** Témoignage recueilli par les chercheurs

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